Un portrait

Chercher le regard des autres tout en le craignant, n’est-ce pas la croix à porter tout au long de l’adolescence? Probablement jamais depuis l’invention du miroir, les jeunes ont eu autant à se préoccuper de la perception de leur image. Aujourd’hui, l’omniprésence de l’espace virtuel met la représentation de soi au centre de nos vies, pour le meilleur et pour le pire. Chaque téléphone cellulaire est une caméra, chaque lieu, le décor potentiel d’une mise en scène que la communauté s’apprête à juger.

Le passage de l’enfance à l’âge adulte est toujours l’avènement de l’être social qui se déploiera sur toute une vie. Qu’en est-il pour cette génération dont l’affirmation de l’identité semble conditionnelle à sa présence sur un écran? Personne ne connaît les effets à long terme de ce souci précoce pour la représentation de soi. Cependant, le pronostic sur la communauté adolescente d’aujourd’hui est sans équivoque : les problèmes de santé mentale sont en forte hausse. Pourquoi les jeunes, pourtant sous grande protection, sentent autant de précipices sous leurs pieds? Peut-être parce que leur hauteur dans la conscience aiguë de leur être donne le vertige…

Dans un tel contexte, le rôle de l’art n’est pas tant curatif qu’exploratoire. C’est pourquoi le projet Un portrait, chapeauté par Erik Beck, responsable des ateliers de création jeunesse à Sporobole, a amené les jeunes à repenser le selfie. En collaboration avec Benoît Côté de l’organisme Cosimu, avec l’école secondaire Mitchell-Montcalm et avec la psychologue Nathalie Plaat, Sporobole présente l’aboutissement du projet sous la forme d’une exposition de leurs travaux picturaux et sonores. Réalisée dans une série d’ateliers de photographie, de création sonore et de psychologie, chaque œuvre est accompagnée d’une tablette électronique et d’écouteurs qui permettent au public d’avoir une perspective nouvelle du portrait en offrant la possibilité d'entendre l'univers sonore de l'artiste.